jeudi 2 mai 2013

102 Vous dites « asexuel » ?

J'ai passé quarante années de ma vie à vouloir faire « comme tout le monde » dans le domaine du sexe. C'est-à-dire, avoir une petite amie. Devoir « faire l'amour » régulièrement avec elle. Partager ma vie avec elle. Si possible – ce qui n'est pas arrivé – avoir des enfants et les élever avec elle.

J'ai mis quarante années à réaliser que la prétention à réduire le « sexe » – en fait la relation chaleureuse et tactile avec l'autre – à un exercice de coïts réguliers était une de plus abominables imbécilités que notre civilisation ait inventé.

En effet, les humains, contrairement à la pensée unique régnante ne sont pas « la seule espèce animale qui a tout le temps envie de faire l'amour ». Il s'agit d'un auto-conditionnement, un dressage culturel.

Mais « la pensée unique » possède d'incalculables ressources pour continuer à se justifier quand elle est contestée.

Je disais dernièrement à une amie que j'avais décidé de cesser d'écouter la pensée unique et allais m'écouter moi-même. Si je n'ai pas envie de faire l'amour en permanence, eh bien, je ne le ferai pas. Ne le chercherai pas. Et tant pis si ça ne correspond à aucun genre de conduite reconnue comme catégorisable dans notre société française et parisienne.

Mon amie a opiné. Et quinze jours plus tard, voilà qu'elle me déclare « asexuel ». J'appartiendrais à une « minorité sexuelle » qui cherche à se faire reconnaître de nos jours.

Une autre amie, qui est aussi mon ex compagne, m'ayant écouté, me sort tout de go : « il faut que tu rencontre une femme qui n'aime pas faire l'amour. Que vous viviez ensemble. Tu la rendras heureuse. »

Mais je ne suis ni asexuel. Ni n'aspire à rencontrer une femme qui n'aime pas faire l'amour pour vivre avec elle et la rendre heureuse ! Je souhaite simplement être authentique et m'écouter. Et tant pis si les autres ne le comprennent pas !

Un ami m'a déclaré que ce que je lui expliquais à mon propos l'étonnait. Il n'avait jusqu'à présent jamais rencontré quelqu'un qui lui tienne un pareil discours. Et, quant à lui, il avait toujours envie de « faire l'amour ». Il m'a même posé une autre question : « ne serais-tu pas homosexuel ? »

Et voilà, la boucle est bouclée. On n'a pas le droit d'être soi-même. Si on ne suit pas les rails de la pensée unique. Ou on désire les filles tout le temps. Ou on est « asexuel » ou « homosexuel » !!

Si une jeune et jolie fille accepte d'être nue en compagnie d'un homme. Accepte d'être serrée dans ses bras, embrassée, caressée, léchée, sucée, doigtée... mais refuse l'acte sexuel, on dira qu'elle est « coincée ». Qu'elle a « un problème ».

Et si c'était justement l'inverse ? Celui ou celle qui ne cesse de chercher l'acte sexuel serait justement « coincé », aurait « un problème » ? Qu'on me démontre le contraire ! Je crois surtout que mon propos dérange les machos et leurs émules féminins, les « machos » de sexe féminin.

Je ne plaide pas contre le sexe, l'acte sexuel. Je ne suis pas non plus asexuel. Mais j'ai le droit d'être moi. Et refuser d'être un zombi obsédé obéissant à la pensée unique régnante.

Basile, philosophe naïf, Paris le 2 mai 2013

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