vendredi 23 octobre 2015

436 Pourquoi les humains sont-ils si malheureux ?

Pourquoi, en dépit de leurs progrès techniques et scientifiques extraordinaires, leurs capacités de production largement suffisantes pour assurer de bonnes conditions de vie à tous, les humains sont-ils si malheureux ? Ou bien ils le sont matériellement et nombreux dans les pays riches ou pauvres, ou bien ils le sont moralement dans les deux. Innombrables sont en France les personnes y compris jeunes, aisées, en bonne santé, cultivées, qui déclarent souffrir de « la solitude », par exemple. Qu'est-ce à dire ? Et la première cause de mortalité dans la jeunesse en France est le suicide, bien souvent pour cause de « chagrin d'amour ».

Quand on observe la souffrance sociale, elle paraît mise en place par des humains contre d'autres humains. Exemple récent et frappant : au nom de la soi-disant nécessité de rembourser une dette illégitime, illégale, odieuse, insupportable et colossale, on a condamné la majeure partie du peuple grec à la misère. La mortalité infantile en cinq ans de plans de soi-disant « aide » a grimpé de 43 %. Les Grecs se sont faits largement insulter dans la presse mondiale, traiter de feignants, fraudeurs, vivants au dessus de leurs moyens et devant à présent rembourser, etc. Est-ce le cas de nouveaux-nés qui meurent à présent victimes du pillage rebaptisé « austérité » ? Et ici, les responsables de cette catastrophe sont connus. Ce sont des chefs d'états ou des hauts fonctionnaires financiers ou « européens ». Si on les observe bien, quels sont leurs motifs pour agir ainsi ? La ruine d'un peuple, sa souffrance, leur apportent-ils quelque chose ? Sûrement pas ou guère. Sont-ils alors « méchants » ? Non, l'explication est ailleurs, c'est la peur.

Car, à les observer avec attention, les responsables de ce désastre brillent par leur banalité. Ils n'ont pas de tares particulières. Ils enfilent des chiffres, des statistiques. Et en tirent des conclusions pratiques sans tenir compte des conséquences dramatiques de leurs actes sur des humains. Ils gèrent des budgets, des bilans, des choses abstraites, des courbes sur des graphiques, des rapports qu'ils n'ont pas lu mais approuvés. Qu'est-ce qui peut animer leur mode d'agir ainsi ?

Les mêmes raisons qui expliquent à petite ou très petite échelle des comportements aussi absurdes et dévastateurs. En voici un : j'aménage un logement pour moi. Quand j'ai fini de l'aménager, un logement à peine plus cher se libère sur le palier. À la différence du mien il est plus grand, dispose des toilettes et d'une douche. Pour y emménager, il me suffit de le décider. Déplacer mes affaires de quelques mètres. Mais, ce faisant, bien sûr, renoncer aux aménagements que je viens de terminer. Comment ça ? Tant d'efforts pour rien, alors ! Je décide sans aucune hésitation de rester dans le logement plus petit et sans confort par attachement à mon travail effectué. Décision de la plus parfaite crétinerie et totalement contraire à mes intérêts. Et pourquoi une telle imbécillité ? Parce que le logement que j'ai aménagé c'est chez moi. Et, je l'ai analysé beaucoup plus tard, j'ai peur d'en changer. Ma peur absurde ayant recouvert et habillé une panique bien plus violente et ancienne : celle suscitée par la sortie de mon enfance prolongée. Pour tout le monde ou presque c'est pareil. La terreur suscitée par la sortie de l'enfance prolongée dicte des comportements irrationnels.

Les chefs d'états et les hauts fonctionnaires sont des humains comme les autres et connaissent la même peur. Mais, bien sûr, leurs actes ont une portée plus grande. Croyez-vous que la hausse de la mortalité infantile en Grèce apporte quelque chose à ceux qui l'organisent ? Qu'ils haïssent les bébés grecs ? Pas du tout, ils ont simplement peur. Et à un moment-donné leur peur épouse des décisions qu'ils prennent parce qu'ils sont effrayés. Ils n'ont pas conscience de leur fonctionnement, mais c'est comme ça que ça se passe. Et ça dure depuis très longtemps. Depuis que le savoir est né et que sa transmission a créé un traumatisme majeur dans la vie de tous les humains, via l'enfance prolongée et la peine pour en sortir. On s'attache à des choses en dépit du bon sens : logement rénové contre logement plus grand, ou remboursement de la « dette grecque ». Et on nuit à soi et aux autres.

Basile, philosophe naïf, Paris le 23 octobre 2015

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