lundi 9 novembre 2015

454 Comment je n'ai pas agressé sexuellement Madeleine

Quelle est l'origine des agressions sexuelles commises par des hommes sur des femmes ? Ce sont des monstres ! Ce sont des brutes ! Ils méritent la prison, la mort, la castration ! Des monstres, des brutes ? Je ne suis pas un monstre, ni une brute. Je n'ai jamais frappé personne. Pourtant, j'ai très précisément ressenti un jour l'envie de commettre une telle agression. Envie à laquelle j'ai su résister victorieusement et heureusement pour moi et l'autre. Mais, cette expérience m'a un peu éclairé sur le cheminement qui peut amener un homme pacifique et doux à devenir une brute et un monstre.

Quand j'avais un âge peu avancé, peut-être quatorze ou quinze ans, j'ai commencé une relation sexuelle déjantée avec une jeune fille. Le soir, sans rien dire, ni elle, ni moi, elle faisait semblant de dormir et je la pelotais sous sa couverture, dans son lit. Cette relation a duré plusieurs années. Quand je suis arrivé à l'âge de dix-neuf ans, pour la première fois de ma vie j'ai quitté seul le logis familial. Et suis parti pour deux mois visiter les correspondants que j'avais en Roumanie.

Dans le train du retour, le 9 novembre 1970, j'ai fait la connaissance de Madeleine, une jeune femme française. Elle est monté juste avant la sortie de Roumanie, dans la gare de Curtici, où elle a fait ses adieux à un jeune homme roumain. Nous avons sympathisé elle et moi, dans la voiture qui paraissait vide à part nous. Nous partagions un compartiment couchettes. La nuit est venue. Je me suis couché dans la couchette du bas à gauche. La jeune femme dans celle du milieu à droite.

Le lendemain matin, je me réveille avant elle. Derrière le store baissé de la fenêtre il fait déjà jour. Paris approche. Et voilà que je suis pris d'une terrible envie de me lever. Pour aller glisser ma main sous la couverture de Madeleine et peloter son intimité ! J'ai dû faire des efforts terribles pour résister à cette envie ! Finalement, au bout d'un certain temps que je résistais à cette envie insistante et très forte, elle s'est réveillé et levé. Nous avons replié les couchettes. Et, arrivés à Paris, nous sommes quittés en parfaite cordialité. Et ne nous sommes jamais revus.

Mais quels efforts moraux j'ai dû faire pour éviter de suivre mon désir de faire avec elle ce qui aurait été la plus bête et lâche agression sexuelle !

C'est la première fois que j'ose raconter cette histoire vieille de presque 45 ans jour pour jour à l'instant où j'écris. Je me souviens très bien de la date, car le jour de mon arrivée tous les journaux français titraient : « De Gaulle est mort ». Il est mort le 9 novembre 1970. Je suppose que le temps d'imprimer les journaux, c'était déjà le 10 novembre.

L'envie à laquelle j'ai réussi à résister était simple : il fallait faire avec ma voisine du compartiment couchettes exactement comme je faisais habituellement avec l'autre jeune fille. Comment ai-je réussi à résister efficacement ? Probablement parce que je suis resté toujours très pacifique. Alors, comment aurais-je réagi à cette envie si j'avais été élevé dans un milieu violent ? Ou, tout simplement, si ma perception de la réalité aurait été amoindrie par une boisson alcoolisée ? Je serai très probablement passé à l'acte. Il n'y a pas si loin finalement entre l'homme sain et le déséquilibré.

Par la suite, j'ai échangé quelques courriers avec Madeleine, qui habitait en Bretagne. Nous nous sommes perdus de vue depuis une quarantaine d'années. Elle m'a probablement oublié. Elle est peut-être grand mère à l'heure qu'il est. Mais moi je n'ai pas oublié ce combat contre la tentation que j'ai mené ce matin de novembre 1970. Il pourrait être utile et éducatif que d'autres personnes qui ont résisté à de telles inadmissibles tentations racontent leur expérience. Ça pourrait aider à prévenir des problèmes et clarifier la pensée d'humains tentés.

Basile, philosophe naïf, Paris le 9 novembre 2015

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