dimanche 10 avril 2016

531 La cuillère de goudron du viol dans le tonneau de miel de l'amour

Il y a diverses sortes différentes de viols : le viol par violence, le viol par abus de confiance, le viol par pression psychologique. Ces diverses sortes de viols génèrent la peur. La peur est l'opposé exact de la confiance indispensable à l'amour. Le viol est la cuillerée de goudron qui très souvent pollue et détruit la douceur du tonneau de miel de l'amour. Une femme vous plaît beaucoup ? Vous auriez envie de la revoir, car vous la croisez un jour par hasard dans le métro parisien ? Vous n'allez oser rien faire. Ou tenterez de l'aborder et elle pourra vous envoyer bouler. Pourquoi ? A cause de l'omniprésence de la peur du viol sous ses diverses formes.

Le viol a pris longtemps également la forme du viol conjugal. La femme doit obéir à son mari proclamait la loi française en 1880. Donc, lisez : obéir aussi au lit. Une dame née vers 1920 me racontait il y a des années que toutes ses amies lui tenaient le discours suivant : « avec mon mari, j'attends qu'il ait fini sa petite affaire pour aller me laver. » Un ami rendu fou par le refus de baiser de sa femme manqua de se suicider il y a environ vingt ans. Sa femme, qui l'a quitté depuis, me confiait : « le pauvre, il ne réalise pas que je n'en ai pas envie. »

Plus subtil et très destructeur existe enfin une forme de viol de la Nature qu'on pourrait baptiser « l'auto-viol ». On se viole soi-même en décidant de « faire l'amour » non suite à un désir effectif et réciproque, mais en vertu d'un raisonnement intellectuel imbécile : « je bande, ma copine est à côté de moi, elle doit en avoir envie, alors : allons-y ! »

Et on met le truc dans le machin. Et la prestation est minable. Et on recommence un certain nombre de fois au cours des années. Et voilà que pour une raison mystérieuse, la copine se barre...

C'est que l'acte sexuel n'est pas un acte anodin. Et, sans s'en rendre compte, on a, acte sexuel imbécile et mal-venu après acte sexuel imbécile et mal-venu, fini par détruire la relation. On est passé insensiblement de l'amour et l'attirance à la haine et au rejet. Et on n'y comprend rien. On est triste tous les deux et la relation d'amour est finie.

Alors, de graves crétins vous souffleront à l'oreille : « c'est normal, l'amour, ça dure deux ans ! » Ou bien encore, plus classique : « c'est normal, c'est la faute de ta copine, les femmes ne savent pas ce qu'elles veulent ! »

Car, pour des centaines de millions de crétins solitaires et égoïstes, que la femme « sache ce qu'elle veut » signifie qu'elle veut exactement ce que son homme veut d'elle. Qu'elle soit tout à la fois sa maman, sa putain, sa confidente, sa garde-malade, sa comptable, sa femme de ménage, sa pondeuse et torcheuse de gosses, son admiratrice, sa pardonneuse... « Fidèle » et le laissant courir la gueuse. Mais qu'elle ne soit en aucun cas une femme à part entière, un être humain de sexe féminin.

Un ami sympathique me confiait très récemment avoir rencontré l'amour. La fille rêvée et il voyait se profiler devant lui une magnifique histoire d'amour. Je peux de mon côté, sans connaître cette fille autrement que par ses propos enthousiastes, vous assurer que cette histoire d'amour est promise à l'échec. Pourquoi ? Parce que la première chose que cet ami a couru faire est le teste du SIDA. C'est-à-dire qu'il s'est dit d'emblée, voilà l'amour, voilà le trou rêvé. Il aurait été plus urgent de se poser la question de lui offrir un cadeau, des fleurs, lui écrire un poème, une chanson, l'inviter à un beau spectacle, une promenade en forêt... Non ! Le cul tout de suite. Il l'aura sûrement, vue la mentalité régnante à notre époque dans sa classe d'âge. Il aura aussi la suite logique de son empressement fouteur : la déception et la fin de sa belle histoire d'amour. Et je ne peut rien lui expliquer. Il est comme le grand tétras amoureux, quand il chante l'amour il n'entend rien.

Basile, philosophe naïf, Paris le 9 avril 2016

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