lundi 15 mai 2017

757 Le premier matin du monde

Le virus du patriarcat fait penser à un virus informatique. Caché, il se faufile, pourri et perverti des programmes sains. J'en ai fait l'expérience. L'essence-même du patriarcat c'est de nier toute vie individuelle, toute indépendance aux femmes. Elles sont sensées n'exister que par et pour les hommes. Traditionnellement, une fois mariée, casée ou maquée, la femme « appartient » à l'homme. C'est « la copine à untel » ou « l'ex de untel » ou « la veuve » de untel. Elle perd jusqu'à son nom et son prénom. La femme de Louis Dupont c'est Madame Louis Dupont... En tous cas cette pratique sémantique prospérait il y a encore juste quelques décennies chez nous, en France.

Sans en avoir conscience, j'ai suivi le troupeau. Une femme jeune et jolie et sympathique, ou bien elle est avec quelqu'un et on n'envisage rien avec. Ou bien elle est « seule » et, comme je suis seul, voilà que j'envisage tout de suite, sans me préoccuper de ce qu'elle pense, d'arriver à en faire « ma » femme... C'est-à-dire qu'au nom de « l'amour » et de ma volonté de remédier à mon célibat, je lui nie d'emblée toute existence indépendante. Tout ceci au nom de « l'amour ». Cette démarche ignoble et ridicule, soi-disant justifiée par les meilleures intentions du monde, je m'en suis débarrassé. Après avoir tout dernièrement et pour la énième fois eu des prétentions imaginaires, matrimoniales et ridicules à propos d'une jolie femme quasi inconnue, j'ai jeté le scénario à la poubelle. Rencontrant depuis une femme qui a tout pour me plaire, j'ai décidé de ne rien envisager. J'ai fermé le cinéma habituel où je me réfugiais avec mes rêves imbéciles et patriarcaux. J'ai éteins le projecteur. « Cette femme est jeune, belle, indépendante, a une belle profession, est aussi artiste, sympathique et m'aime bien... qu'est-ce que j'envisage de particulier avec elle ? Et bien rien !!! »

Renoncer à des illusions donne l'impression de renoncer à quelque chose alors qu'en fait on renonce à des fantômes. J'ai eu un peu l'impression de renoncer à quelque chose. Cette femme et moi avons parlé agréablement, échangé des informations, projeté de nous revoir, promener et aller à la piscine.

Et voilà que le quatorze mai, lendemain de notre rencontre est arrivé. Et ce fut pour moi comme le premier matin du monde. Car le matin en me réveillant j'ai réalisé ceci : nous avons besoin d'aimer et être aimé. J'ai rencontré cette femme. Nous avons parlé agréablement, échangé des informations, émis les projets communs de nous revoir, nous promener et aller à la piscine ensemble. Nous avons passé un moment très agréable ensemble.

Et bien nous nous aimons. Bien sûr, je peux l'admettre à condition de redéfinir l'amour. Qui n'est pas chercher absolument et à tous prix au minimum le mariage. Mais rechercher et accepter l'amour réel. Où il est possible que nous ne couchions jamais ensemble. Mais où nous passons ensemble des moments très agréables. Avec les projets de nous revoir, nous promener et nager ensemble. L'amour, le vrai amour c'est ça. Pas les suppositions fumeuses et les fantasmes d'amour toujours et autres balivernes. C'est ça l'amour réel loin de tous les fantasmes et toutes les jalousies.

Mon obsession passée de trouver « l'amour » dissimulait mal le patriarcat qui nie à la femme toute indépendance. Ce qui peut se faire au nom de « l'amour ». Le harcèlement matrimonial qui en découle empêche les bonnes relations de s'établir entre l'homme et la femme.

J'entreprends littéralement une auto-correction pour éliminer de moi autant que possible le patriarcat. Jusque y compris dans le domaine de la façon de regarder les femmes dans la rue et les lieux publics. L'amour existe, mais il n'est pas ce qu'on croit. Ceux qui le cherchent font penser à des personnes qui chercheraient des arbres dans une prairie, déclarant que seuls les arbres représentent la Nature. Mais l'herbe c'est aussi la Nature, même si sa forme est différente de celle des arbres. Qui existent aussi par ailleurs. Mais ce qui nous intéresse à présent c'est l'herbe.

Basile, philosophe naïf, Paris le 15 mai 2017

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