mercredi 19 juillet 2017

822 Oublions l'art de nous rendre malheureux ainsi que les autres...

J'ai l'habitude de dire : « quantité de personnes font de très grands efforts pour se rendre malheureux, et leurs efforts sont récompensés ! » C'est notamment le cas de la manière classique suivante :

On se sent souffrir de la solitude. Alors on envisage comme réponse à sa détresse de trouver une personne qui vous comblera en tout : par sa présence, ses câlins, son activité sexuelle, éventuellement si on est en âge de « fonder une famille » : par ses qualités reproductives et éducatives des enfants, par la reconnaissance sociale et le soutien matériel. En résumé : la couple parfait qui est en amour l'équivalent de la pizza complète à la pizzeria. Celle où il y a tout : de la purée de tomates, plusieurs fromages, des champignons, des olives, des anchois, du jambon, etc.

De tels couples dits « parfaits » existent. J'en ai rencontré et en connais au moins trois, un à Paris et deux en banlieue : ils s'entendent à merveille, sont beaux, vivent ensemble, n'ont pas l'air de s'ennuyer, ont de superbes enfants, sont mariés, etc. J'en ai aussi certainement croisé d'autres sans les identifier. Mais, à côté de ces réussites, combien de bricolages sordides ressemblant y compris parfois à une espèce de prostitution ? « Je te donne le loisir de m'utiliser sexuellement. Et en échange nous vivons ensemble et payons ensemble les factures communes. » C'est presque ça.

À force de ne chercher que des pizzas complètes on passe à côté de bien des choses. Mais certains ne se posent pas trop de questions. On est jeune et beau ou jeune et belle. On se trouve un ou une partenaire équivalent. On fait tout comme si ça collait bien. Quand ça ne colle vraiment plus on se sépare. Et on trouve un ou une partenaire de remplacement. Ça fonctionne très bien ainsi tant qu'on est considéré comme « jeune ». Après, ça devient amère. Les nouvelles générations de jeunes vous font une concurrence invincible... Alors, on reste seul, ou on se contente « des restes », comme ils disent. Soit d'une compagne ou un compagnon déjà comme vous un peu décrépit. Comme le commentait tristement une femme ex vedette de cinéma jadis célèbre comme « sexe symbole » : « on a un cœur toujours jeune et il y a tout qui pendouille... » Je cite de mémoire, mais le sens y est.

À écouter certains, l'essentiel serait de ne pas réfléchir et être « spontané ». On est seul, on se sent seul ? C'est la faute à l'autre, au sexe opposé, à « pas de chance ». Ce n'est jamais le produit aussi de vos responsabilités, vos actes, vos intentions. Comme on veut tout tout de suite, on rejette tout ce qui ne ressemble pas à la perspective de la dégustation de la fameuse pizza complète tant espérée.

Quand je sors mon discours sur les câlins et la relation tactile, j'ai l'impression d'être un Martien. Ceux qui m'entourent ont leurs idées arrêtées sur « le sexe » à pratiquer et « le couple » à chercher à former. Améliorer nos relations en général entre individus bien informés et de bonne volonté revient pour eux à vouloir apprendre à un canard à courir un cent mètres. Une idée belle, absurde et irréalisable.

La confusion relationnelle générale durera tant qu'on cherchera à rencontrer « la bonne personne » et personne d'autre. Tant qu'on évitera de jeter un regard critique sur le comportement humain en amour. Non, il n'existe pas une fatalité qui nous condamnerait éternellement à continuer à souffrir et rêver. On peut sortir des vieilles équations et aller ailleurs, plus sûr, plus sensé, plus heureux, plus libre et surtout respectueux de soi-même et des autres.

Le temps de la caricature amoureuse est révolu. Cessons de croire au bonheur. Construisons-le avec les matériaux et les outils dont nous disposons. Laissons la « perfection » empêcher de dormir les rêveurs et satisfaisons-nous d'admirer la perfection de ce qui est. 

Basile, philosophe naïf, Paris le 19 juillet 2017

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire