mercredi 16 mai 2018

992 Qu'est-ce que c'est « être amoureux »

En temps « normal », c'est-à-dire quand notre vie se déroule de façon habituelle pour notre société, nos relations sont tributaires de l'état de conflit permanent résultant du conflit originel. Celui-ci dure depuis au moins dix mille ans, quand les humains ont inventé l'agriculture et l'élevage. Ignorant l'ovule et l'ovulation les hommes se sont crus alors les seuls agents actifs de la reproduction. Ensemençant la femme, réduite à une sorte de terre passive devant être subordonnée, dominée par l'homme. Devant lui « appartenir ». L'ovule et l'ovulation n'ayant été découvertes qu'au dix-neuvième siècle. L'ovule a été découverte en 1827 par le savant estonien Karl Ernst von Baër. L'ovulation a été décrite pour la première fois vers 1840 par deux médecins français : Félix-Archimède Pouchet, de Rouen, et Charles Nègre, d'Angers.

Le besoin de paix entre les humains a cohabité depuis toujours avec le conflit originel qui trouble toutes les relations humaines. Qu'est-ce que c'est « être amoureux » ? C'est parvenir à être en paix ou entrapercevoir la paix avec un humain avec lequel nous sommes habituellement en état de défiance et conflit comme avec tous les autres humains, y compris nous-mêmes. Mais ce sentiment de paix est fragile et menacé, essentiellement par deux choses : la formalisation et la peur.

La formalisation est d'origine culturelle. Elle nous fait croire que l'état amoureux implique nécessairement toute une série de choses, par exemple la recherche du coït, la vie à deux, l'officialisation d'une relation dite « exclusive », la fondation d'une famille. Toutes choses qui ne sont pas négatives en soi, mais le sont quand on les ramène systématiquement et par formalisation. Le délire sexuel consistant à vouloir absolument ajouter à l'amour l'acte sexuel est un des comportements les plus immédiatement destructeurs de l'amour. De nos jours c'est un comportement très courant chez beaucoup d'humains qui croient de bonne foi à une sorte d'amour type, de modèle incontournable à suivre. Alors que chaque individu est différent. Chaque relation est différente. Et tout n'arrête pas d'évoluer en suivant son cours et se modifiant en permanence. Le programme de conformisation détruit très efficacement quantité de relations amoureuses et empêche la naissance de la plupart des autres.

Le sexe à la mode aujourd'hui est patriarcal et consumériste. La femme dans la culture régnante sous nos latitudes aujourd'hui est perçue comme une prostituée exclusive, gratuite et sur abonnement. Alors que l'acte sexuel n'est en aucun cas un produit de consommation ou un label de qualité. Tout une mythologie sexuelle imprègne notre société, où le bonheur obligatoire est assimilé à une gesticulation qui n'est rien d'autre qu'une masturbation dans un vagin, pas de l'amour. L'amour est très efficacement anéanti par cette gesticulation. Souvent au bout de quelques années de magnifiques histoires d'amour font incompréhensiblement naufrage. Et alors de doctes imbéciles surgissent avec une explication simple et fallacieuse : « l'amour ça dure deux ans », ou bien : « l'amour ça dure quatre ans », etc. Ou bien : « ça ne pouvait pas marcher, il y avait un trop grand décalage d'âge », « de culture », « de niveau de vie ». Il n'y avait pas ou plus « d'accord sexuel », etc. La paix entre deux individus, pour perdurer doit être respectée. Tout le fatras de la conformisation doit être porté là où il a sa place : dans la poubelle. On peut très bien aimer, par exemple, sans qu'il y ait coït, ou sans qu'il y ait exclusivité. L'essentiel est de se respecter et respecter l'autre. Ce qui n'est pas forcément d'emblée facile. La patience a aussi ici un rôle à jouer.

Le second ennemi principal de l'amour, c'est la peur. À partir du moment où on subit en amour une série de cuisants ét incompréhensibles échecs, on développe la peur de l'autre, la peur de la relation avec l'autre. On s'enferme dans une solitude qui peut y compris être « une solitude à deux ». On évite d'être vraiment amoureux. On goûte cette situation du bout des lèvres. On est prêt à fuir à chaque instant. Combien de « couples » qui en fait n'en sont pas ? 

Basile philosophe naïf, Paris le 16 mai 2018

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